
Dans l’affaire, qui a été jugée par la première chambre civile le 11 janvier 2023, un parquet cantonal suisse a délivré dans le courant de l’année 2002 à un créancier resté partiellement impayé, une attestation de défaut de paiement du bien. Il est utile de préciser pour plus de clarté qu’en droit suisse le créancier qui a participé à une saisie et qui n’a pas été intégralement payé reçoit un acte d’action du bien pour le montant impayé, cet acte vaut reconnaissance de dettes (loi fédérale suisse sur la poursuite pour dettes et la faillite, art. 149).
Le créancier appela alors le débiteur en France, pour laexequatur de cet acte de défaut de propriété.
Le débat s’est développé principalement sur la question de la prescription : l’arrêt précise que « si les règles de prescription de l’Etat d’origine sont susceptibles d’affecter la force exécutoire du jugement et donc la cause du demandeur.exequatur et si celles de l’Etat requis sont susceptibles d’affecter l’exécution forcée du jugement déclaré exécutoire, d’autre part, l’action en exequatur lui-même n’est pas soumis à prescription ».
Ce principe, qui comporte trois aspects, est d’abord énoncé en ces termes et est important. Avant de l’examiner, cependant, une remarque terminologique mérite d’être faite.
Une incertitude terminologique
On sait que dans les relations franco-suisse (et plus généralement dans les relations entre les Etats de l’Union européenne d’une part et la Suisse, la Norvège et l’Islande d’autre part) il existe des règles juridictionnelles, directes et indirectes. régie par une Convention de Lugano, dont il existe deux versions successives. La Convention de Lugano concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, signée le 16 septembre 1988, était initialement applicable, avant la Convention concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale.
Dans l’affaire, qui a été jugée le 11 janvier 2023, l’accord du 16 septembre 1988 était applicable, car en 2002 l’acte de déchéance du bien a été délivré.
Cette convention du 16 septembre 1988 (ainsi que celle du 30 octobre 2007) détermine notamment le régime de reconnaissance et d’exécution (art. 25 p.) en France des jugements rendus en Suisse.
Et c’est à ce propos qu’intervient une incertitude terminologique. Ayant appliqué la convention de Lugano dans une branche du moyen (qui ne sera pas commentée ici), l’arrêt, quant à une autre branche, renvoie à un recours en exequatur du créancier et définit, dans les termes indiqués, le régime d’une telle action.
Toutefois, sauf erreur de notre part, c’est bien le régime d’exécution des jugements rendus en Suisse qui est précisé par le jugement et non le régime deexequaturqui fait partie du droit international privé français commun, qui n’est applicable qu’en l’absence de convention internationale ou de règlement européen.
Cela dit, cette incertitude terminologique n’est finalement pas pertinente. Le principe que la Cour de cassation a posé doit s’inscrire à la fois dans le cadre des conventions de Lugano et dans le cadre de laexequaturet aussi en présence du Règlement Bruxelles I du 22 décembre 2000 et Bruxelles I Jusqu’à du 12 décembre 2012, comme nous l’indiquerons.
L’apport du jugement
Sous cette réserve terminologique, il convient d’examiner l’apport de l’arrêt et de distinguer les trois aspects du principe énoncé dans l’arrêt.
La force exécutoire à l’étranger du jugement
Il est certain qu’une décision étrangère ne peut être déclarée exécutoire en France que dans la mesure où elle se trouve dans l’État où elle…